samedi 26 mars 2011

Mon calice....

Hier matin, comme avant-hier matin.


Depuis le début de la semaine, on vit petit, tout petit. Repas sans fromage ni dessert. Tout petits déjeuners. Trajets minimum. Collège, Boulot.

La vie prend un goût d’aventure au quotidien. Les aventures comme on les aime sur la chaîne certifiée conforme « amie du président ». Tu veux vivre la vie de galère quotidienne des surendettés, inscris-toi vite au prochain casting, et tu pourras toi aussi, parler avec les gentils revolveurs, te dépatouiller avec ton banquier, ton fournisseur d’accès, tes zados, tes ex, et tous ceux qui te réclament du fric, du fric, et encore et encore du fric. Toi aussi tu pourras déjeuner d’un petit bout de tartine qui traînait au fond de tes placards, toi aussi, tu pourras goûter la patate archi germée, un lait de 10 jours d’âge « tant pis », des fonds de paquets de nouilles de riz, de semoule, tu apprendras à faire les croque-monsieur à la putanesca, avec tout ce qui peut tartiner une tranche de pain, puis passer dans un four. Tu découvriras le repas en apnée, et en mode sans neurone, que l’on compose du contenu d’une boîte de conserve au plus bas des bas prix, celui,qui, qu’il soit composé de viande, de poisson, de légumes, a la même odeur, de fer, de gras et de boîte pour chat. Celui qui te fera dire, « bon ok, mais je mange au moins, alors je ne me plains pas ». Je ne te dévoile pas tout car il faudra que tu découvres par toi-même, toutes les astuces, et tous les petits plaisirs qui deviendront les tiens. Si l’aventure te tente, rejoins-nous sur « Il en faut peu pour être heureux, notre roi l’a dit ».

De cette aventure-là, j’ai encore vécu une tranche cette semaine. Et je ne la vis pas seule, puisque les tdc sont encore avec moi jusqu’à demain. Si épuisée de cette lutte, j’en arrive à ne même plus préparer de repas. Chacun, gratte au fond du frigo et du placard, pour trouver à préparer ce qui lui « plait ». Une chance, l’exigeant nounours chamallow est en stage dans un restau et ses horaires l’obligent à prendre se repas sur place. C’est toujours ça de gagné pour lui. La lutine, elle, est moins exigeante, et se contente d’inventer comme moi, des tartines aux œufs brouillés avec des morceaux de chèvres cuits au miel, heureusement nous sommes riches en imagination et en créativité et nous arrivons à nous régaler parfois. Je lui laisse ses créations, et me rabats souvent sur les boîtes citées plus haut, données par un ami, et qui lui viennent de l’armée. Boîtes rations de campagne. A déguster seulement si on a perdu tout sens olfactif et gustatif, sinon tu gerbes. Voilà pour l’alimentaire.

L’autre préoccupation, est l’alimentation des neurones, et donc le fait que la lutine doit aller au collège tous les jours. Je dois donc alimenter ma voiture, sinon pas d’école possible. La voiture donnée par l’ami Tony-traunt(la faudrait que je lui trouve un meilleur pseudo) est aussi gourmande qu’il rit fort. Elle est gloutonne. Et elle vit en ce moment elle aussi sa période de disette. Le 27 de ce mois, le salaire de Mars arrivera. Je la récompenserai d’une rasade généreuse de sans plomb 95, qui me coûtera 80 euros, pour la remercier de sa patience et de ses services. Mais ces jours-ci, je crois qu’elle aussi en a plus que marre de vivre avec la jauge dans le rouge en permanence. Je lui donne dix euros par dix euros, et l’aiguille ne dépasse jamais la première barre…. Lundi matin, elle a eu droit à ses dix euros. Et mardi soir, j’avais déjà estimé que nous touchions le fond. Par bonheur, mercredi était pour moi, un jour de rtt, et j’ai proposé à la lutine, de rttéiser avec moi. Je sais c’est mal, je sais, c’est nul, je sais j’ai menti au service scolarité en disant que j’étais malade et que je ne pouvais pas conduire. Je savais que ce mercredi matin, un prof était absent, qu’il y avait sport, et techno, donc…. Ben voilà, si des profs me lisent, ça aussi, ça peut être une cause d’absence. Et ça aussi, ça peut bouffer la peau des parents. La « misère » prend parfois des tours que l’on n’imagine pas. Nous avons profité de cette journée pour nous coller l’une à l’autre, nous raconter des histoires, regarder des émissions nazes, parler anglais toute la matinée ( je sais alibi nul. Mais en ce moment la lutine a envie d’être bi-lingue, et elle parle anglais sans arrêt, j’en profite. Elle a tendance à jouer des rôles en permanence, et en ce moment, elle est née de parents étrangers, donc je deviens tantôt une madre, tantôt une mother… Elle fantasque cette enfant, on se demande de qui elle tient, je crois que j’avais la même envie à son âge….). L’après midi, nous avons passé un grand moment à nous battre sur le lit, avec les coussins, les postillons, les mains, comme des gamines. Et je me disais que c’était un bon moment, mais que je ne ressemblais pas à une maman de bientôt 51 ans, qui se noie sous les problèmes. Ca me rappelait des moments vécus avec la gazelle quand elle avait le même âge… Même le nounours qui était à côté et qui ne partage pas ce genre de « crise », souriait de nous voir « si folles ». Avec lui, le jeu prend tout de suis un tour plus « brute », et finit vite en cris et en disputes, pour coup mal placé… Ca fait du bien tout ça. Parce qu’après ça se complique. Dès jeudi matin. Départ pour le collège. Nous parcourons trois kilomètres et je sens que j’ai du mal à accélérer, puis la voiture tousse, re-tousse, et s’immobilise sur le boulevard… Je parviens à me serrer à droite et à me garer sur un trottoir. Il est 7 heures 45. Distance parcourir, 12 kilomètres. Sachant que la station service est à un kilomètre, que la méli-mélo, à juste 15 euros en poche, qu’elle n’aime pas marcher, qu’elle n’a pas de chaussettes et ça va lui brûler les voûtes plantaires, que la lutine n’a pas déjeuné, et que la sonnerie du collège retentit à 8 heures 25, calculez le retard qu’aura accumulé l’élève, et celui qui de la mère si vous pouvez. La distance, fut parcourue, le chausson aux pommes acheté, les voûtes plantaires échauffées, la voiture alimentée. Nous étions devant le collège à 8 heures 26 et il restait tout les fumeurs et les conducteurs de scoots dehors. Ouf !!! Moi-même suis arrivée vers 10 heures, puisque j’ai du faire un arrêt chez moi, car visite pour l’entretiend e la chaudière avant mon déménagement. Petit contretemps. L’entretien n’a pas été fait, car la banque ayant rejeté les prélèvements mensuels, je devais payer 50 euros pour qu’il soit réalisé. Je ne les avais pas, donc visite ajournée.

Jeudi soir, j’avais déjà parcouru 91 kilomètres dans la journée, because, j’ai du aller chercher une amie qui n’a pas de voiture, dans la clinique où elle venait de se faire opérer, et la ramener chez elle. Et repartir travailler, puis repartir vers le collège et rentrer épuisée à la maison.

Hier matin, je suis partie assez confiante dans la quantité de carburant qui me restait. J’ai vite déchanté, car les boulevards à peine entamés, je sentis le ralentissement se manifester. Même manip que la veille, warnings, toux du moteur, rapatriement sur quasiment le même trottoir. Mais là, heureusement, j’avais encore un peu de carburant dans la bouteille de la veille…. Elle est pas fûtée la méli-mélo ???? Je dirais presque prévoyante… Non, je sens que j’abuse. Bref. J’ai réussi à amener la lutine à destination sans aucun problème et avec l’avance qui lui est nécessaire pour retrouver les copine devant l’entrée du collège et finir de raconter ce qui n’a pas été dit sur facebook. Soit un bon quart d’heure. Je n’ai pas voulu lui pourrir sa journée en lui disant que si elle était sauvée, moi pas. Le fond de la bouteille, ne suffirait pas à me mener à faire le 12 bornes vers le bureau. Mais là le problème se corsait sérieusement.

Fond de sac , 5 centimes. Sac à dos, pas un rond. Carte bleue muette. Carte de retrait de la poste limite du positif. Donc pas de possibilité de remplir la bouteille. Je décide d’aller le plus loin possible et on verra. Je suis comme ça moi. J’avance et après on voit. Et voilà, on voit. On tousse, on cale, et on se gare. On se dit qu’on va appeler quelqu’un au secours, qui pourrait venir porter un peu d’essence. J’ai aperçu la voiture de ce quelqu’un devant l’école du village où je dépose la lutine. Elle doit encore y être, parce qu’elle pose ses petits à la garderie, et qu’elle est bavarde. Je prends mon portable. Sonnerie stridente. En trois secondes je comprends, ma ligne est suspendue, j’étais avertie. Bien fait pour toi la méli, t’avais qu’à payer même si tu pouvais pas. Paf t’es punie !!! Je tente le sms : interdit !!! Paf la méli, t’es punie de sms aussi … Il y a bien un garage Renault, juste à côté, à la sortie du village. Je vais aller chercher du secours, avec ma bouteille. Ben tu me crois, il fait pas station, ça j’avais bien vu, mais en plus il a pas un millilitre de super…. Je suis certaine que ce n’est pas vrai. Mais je suis trop âgée, petite et ronde certainement, pour des arguments plus persuasifs qu’un malheureux « s’il vous plait » !!!

Voilà le plan B : Aller à pied jusqu’au village, aller retirer quelques euros, et aller à la station du petit supermarché pour remplir ma bouteille qui m’a déjà sauvée deux fois. Mais hic au plan B… Il n’y a pas de distributeur dans cette putain de poste de trou du cul du monde….La poste ouvre à 9 heures, il est 8 heures 30, ça ce n’est rien je peux attendre. Autre hic, mon compte doit être à 1 euro, et je ne sais pas si je pourrai faire un retrait de 1 euro au guichet. J’ai un découvert de 100 euros autorisé, mais je ne sais pas i le postier acceptera de s’en servir et de me donner 10 euros….

C’est en me rendant à pieds à la poste que tout cela tournicotte dans ma cervelle désespérée et épuisée de tout ce merdier. Je psychote à mort sur ces années de galères, qui ne s’épuisent pas elles. Je me dis que peut-être bientôt ça ira mieux, ou peut-être pas. Et si ça n’allait plus jamais. Je marche en pensant. Je pense en marchant. Je passe le pont de l’autoroute et je pense en marchant que le désespoir peut changer le trajet vers la poste. Pas le mien, il n’a pas atteint le point de non retour. Mais le désespoir pourrait faire enjamber la rambarde, et là on ne doit pas se rater à la vitesse où roulent les voitures et les camions. Je pense aux tdc, et à des temps meilleurs, ça va vite dans la tête. Je pense que je ne pourrais pas faire une telle chose. Puis, je marche en pensant. Et je passe sur le pont de chemin de fer. Là aussi, il y a des désespoirs qui pourraient s’échouer. Il y a d’ailleurs une grande grille qui protège les catainers. C’est moins rapide, moins radical, plus traumatisant pour plus de monde…. Je pense en marchant, que je vais bientôt aller mieux. Les idées vont vite et l’une remplace l’autre. On a comme une torsion dans le ventre de ces idées qui viennent, puis une autres de ces actes que l’ont ne pose pas, et encore une pire de ce qui aurait pu…. Et me voilà devant la poste à 8 heures 45. Attendre. Penser. Je finis par découvrir un euro au fond du sac à dos, je pourrais au moins mettre ça dans la bouteille si le postier ne veut pas me donner d’argent. Il fait bon. J’ai de la chance qu’on soit au printemps. J’ai de la chance d’avoir trouvé un euro. J’ai un quart d’heure pour penser. Je n’ai pas de bouquin, j’aurais pu lire un peu. Mais en ce moment, je n’y arrive pas. Depuis un mois, je n’ai rien pu lire. Mon esprit n’y est pas. Je m’échappe immanquablement de ce que me racontent les lignes. Seuls les blogs me distraient. Les histoires sont courtes. J’ai l’impression de connaitre les personnes et de prendre de leurs nouvelles. Penser et attendre encore quelques minutes. Se dire qu’on va pondre une note avec ce moment. Boire le calice jusqu’à la lie. Ce serait un titre. La poste ouvre. Le postier accepte les 10 euros de retrait. Il n’y aura pas de plan C à échafauder, bien que j’avais déjà un peu commencé… Je marche vers la station, remplis la bouteille, marche en pensant vers la voiture. Je repasse les ponts, les idées noires sont un peu plus loins, dans un fond de mon cerveau… D’un coup de pensée positive, je les renvoie encore plus loin… Elle est comme ça la méli, elle balaie. Carpe diem comme disent les hommes de meetic… Quand j’atteins la voiture j’ai les voutes plantaires en feu. J’aime pas les chaussettes, c’est pas sexy… Je vais avoir des ampoules. Je roule vers la ville. Ouf. Je fais mes 10 euros à la station de la ville. Je pleure un peu en roulant vers le bureau. Un homme me regarde et me sourit gentiment dans sa voiture. Je respire lentement pour ne pas arriver en larmes. Grâce à ma carte ce soir je pourrais retirer quelques euros et mettre encore un peu de carburant. Je dois repartir au collège, aller amener le Nounours au foot, l’attendre, et le ramener. Samedi, il y a théâtre pour la lutine, il me faut l’amener aussi, car c’est dans un quartier, un peu chaud. Les théâtres aiment bien s’installer dans des no man’s land infréquentables.

Là, je raconte tout ça en attendant devant le théâtre justement. Deux heures à tuer. Pas les moyens de faire les trajets deux fois, donc il me faut m’occuper en attendant. J’ai pris l’habitude de ces longues heures, devant le foot, devant le collège parfois, devant le théâtre maintenant. Pour les tdc, pour eux sans me plaindre trop. L’an prochain, je ne ferai plus tout ça. Le collège de la lutine sera juste en face de chez nous. Le nounours trouvera un club de foot plus près, pour le théâtre nous verrons…. Pendant dix ans, j’ai accepté tous ces trajets, car c’est moi qui avais décidé de mes déménagements. Ken, l’ex, est un sédentaire à racines tournantes. Il s’encre en un endroit et ne veut plus en bouger. Il était hors de question de bouger d’école pour les enfants. J’ai donné dix ans. Je ne veux plus je ne peux plus. Cà m’a coûté assez cher sur de nombreux plans. Les enfants ont maintenant en âge de prendre les bus, les trams, et quoi que veuille leur père, maintenant ils ont leur mot à dire. Si j’ai plié c’est pour les enfants et non pas pour me soumettre à ses désir qui sont d’ailleurs ceux de sa Barbie.

Voilà que j’attends et que je me remets à penser….

2 commentaires:

  1. Courage.

    Que dire d'autre ? (vraie question)

    Courage. Il y aura de meilleurs temps.

    Alice

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  2. ça fait mal... Mais comment tu es arrivée à ce stade alors que tu bosses ?

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