dimanche 16 mai 2010

L'Art majuscule et la poésie minuscule

COURAGE C'EST TRES TRES LONG...


Je narrais dans mon dernier post cette passionnante et non moins rebondissante dizaine d’années de vie commune, partagée avec mon Espace Turbo D, aussi nommé la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes… Et au détour d’une ligne, vous lûtes si vous fûtes allés jusqu’au bout de l’histoire, qu’elle passa (la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes) quelques heures hospitalisée dans le petit garage de la petite rue où j’habite aujourd’hui. Un garage avec un garagiste. Et un garagiste avec un employé aussi appelé si je ne me méprends point mécano.

Petit portrait :
Ici ça sentait le cambouis à plein nez, c’était bruyant assourdissant, et peint en blanc et bleu genre la Grèce, ses îles, Myconos et tout, sauf que là, on ne passait pas ses vacances. Sauf qu’aussi le-the garagiste, c’était un bonhomme avec une grande gueule et un prénom que je n’ai pas pu retenir, même là à la minute, je le cherche encore, ça va me revenir… Il était un peu genre du Maroc, je crois. Il avait un grand sourire et un œil d’entourloupeur, s’tu vois ce que je veux dire. Bon garagiste, je sais pas s’il l’était j’y connais rien, et il avait dû s’en apercevoir. Mais sincèrement, je ne crois pas qu’il m’ait trop entourloupée, bien qu’il ait dû remettre quatre fois sur le billard ma « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes »…quand elle a cassé son embrayage. Chaque fois qu’elle sortait du garage, je faisais deux trois kilomètres et pof ! re-cassé l’embrayage. Là, il rigolait plus du tout. Et quand en face de chez lui c’est devenu chez moi,… ah oui, son prénom c’était Stofa, pas facile à enregistrer, j’ai dû faire un blocage à cause de qu’il s’occupait de « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes ». Le soir, et souvent le midi, quand tu rentrais chez Stofa, tu savais que c’était pas la peine d’aller le chercher dans l’atelier. Nan, nan, il était plus dans l’atelier. Il était dans Son Bureau Mossieu Stofa. Tu le savais à l’odeur, que tu suivais, une odeur de Pastis, de whisky, et de Gitanes mélangées. Et puis, ça rigolait gras et couillu et quand tu rentrais dans le bureau, tu avais l’impression de n’être qu’une paire de seins sur pattes. Les yeux vitreux dégoulinaient sur toi comme le miel sur la cuillère. Et souvent, quand j’entendais le rideau de fer se baisser, je voyais tous les potes de Stofa un peu titubants sur le trottoir, reprendre leur 4x4, leur vélo, ou leur jambes à leur cou, pour aller rejoindre maman…
En juillet dernier, le stofa-club a fermé. Stofa avait 63 ans et il avait envie de faire chose rapido parce que la vie est courte. Et j’ai pensé que non seulement j’avais plus de garagiste, mais qu’en plus c’était comme un petit bout de poésie qui s’en allait.
Mais très vite je repris espoir puisque j’appris que le garage serait durant l’été transformé en galerie d’artiste. Ca me plaisait comme idée. J’me voyais déjà côtoyant du poète, saluant du sculpteur, copinant avec le monde de la création. Bref, je préférai ça que l’installation d’un autre garage.
Quand fin Aout, en rentrant de ouacances, j’ai vu le rideau de fer à nouveau levé, je me suis réjouie de pouvoir à nouveau admirer l’immonde peinture bleu et blanche souillée des traces de cambouis. Pas très très longtemps, puisque comme à l’accoutumée depuis des mois, ayant garé mon « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes » juste devant l’entrée du garage désaffecté, j’ai vu surgir un homme à lunette sec, furibond et en bleu de travail. Le nouveau maître des lieux, ai-je présumé puisqu’il ne se présentait pas mais me demandait de dégager illico. Après m’être présentée comme la voisine d’en face, j’ai précisé que je vidais ma voiture et que je dégageais. Il m’a avertie que désormais, la place devait être vacante car désormais, le lieu allait accueillir des expos et qu’il fallait qu’on puisse entrer et sortir à l’aise dans le lieu. Oui, parce qu’on dit pas un atelier, ni une salle d’expo, on dit un lieu. Sinon, on a l’air d’un crétin de base.
Donc le lieu accueille une asso nommée monoquini, mais avec un k. Non c’est pas un bordel topless. Avec un chef d’asso, qui rigole chaque fois qu’il pleut des omelettes. Bon pour tout dire, j’ai continué à garer ma « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes » quand le rideau était fermé et je me suis fait prendre en flagrant délit plusieurs fois, donc on était pas super super poteaux. Mais tout changea le jour où je me fis choper à me garer avec le véhicule du boulot, sur lequel toutes les faces sont marquées je suis un narkéo. Le chef d’asso est sorti pour me virer et là, … il a souri. Et il a dit « Vous êtes narkeo ???? » « Ben je travaille dans cette branche, j’ai répondu parce que j’ose pas m’appeler narkeo, j’ai l’impression de voler le titre. » Et là, vas-y que je te parle comme si on était les plus vieux potes de la rue, et que je te dis que oui tu peux te garer quand je suis pas là si tu veux, et je te dirai quand tu déranges et que tu dois sortir, s’il te plait madame la narkéo.
Ben là, je vais plus déranger souvent vu que « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes » elle est kapput-décédée. Alors depuis, il me sourit et me demande si je vais bien. Et aussi je reçois maintenant toutes les invit à ses vernissages, où jamais je suis allée.
Bon il faut dire qu’on n’est pas non plus envahis par l’évenement quotidiennement.
J’ai raté le premier. C’était une soirée pour halloween, mais pas l’halloween des ados et des pré-pubères, non ! Celui des hardos, des gothiques trentenaires, des purs et durs qui ont rien à voir avec cette fête commerciale orange et noire. Par bonheur, j’étais en vacances avec mes tdc lors de la première soirée. OUF !!!
Puis très vite après, le rideau est resté ouvert non stop parce que le lieu accueillait des artistes pour un festival saisonnier bordelais genre « JE CREE MOI MOSSIEU !!! ET SI TU COMPRENDS RIEN TES N’UN CON DE BASE »
De ma fenêtre de salon, j’ai donc vu sur la première salle du lieu. Je précise que le lieu a été laissé dans son jus, avec le bleu le blanc les traces et les odeurs de cambouis et d’huile de vidange. RHOLALA trop la classe. Plus proche de la réalité de la vie tu vois coco ! Donc de ma fenêtre, je voyais défiler non-stop sur le mur mi-bleu-mi-blanc une projection de diapo. J’avais l’impression que c’était des voitures qui tournaient autour d’un rond-point. Et chaque fois que je regardais par la fenêtre la même voiture tournait autour du même rond-point.
Le samedi avec ma lutine, férue d’arts et de loisirs créatifs, initiée par Barbie sa belle-mére inscrite dans un club de scrapbooking, nous avons pénétré dans le lieu.
Une jeune fille, étudiante aux beaux-arts, nous a proposé de nous guider. J’ai refusée, genre initiée à qui on n’explique pas l’art. Donc de plus, prés, j’ai eu confirmation du rond-point et de la voiture. J’ai même pu m’asseoir, en face car on avait placé un banc face à la projection. Pour moi, béotienne lambda, qui dit banc qui dit projection dit spectacle, dit s’asseoir pour regarder. Et peut-être même comprendre. C’est la lutine qui a fini par me demander ce que j’attendais car même si les voitures changeaient, même si les rond-points changeaient, et même si parfois une lettre majuscule apparaissait sur le rond-point, on n’allait pas y passer la nuit, il fallait bien s’y résoudre, rien n’allait exploser, personne ne scratcherait sa « la boîte à emmerdes que si t’en a pas encore elle va t’en offrir des tonnes » sur ce sacré rond-point. Je quittai donc le banc avec une désinvolture feinte. Et ma lutine et moi avons ainsi cheminé dans le lieu, nous non-extasiant devant des mains qui dessinaient des angles droits avec une équerre, à l’infini, sur le mur blanc-bleu, des coussins amoncelés dans un coin du lieu avec des cailloux comme occupants, un sol jonché de pochettes de disques vinyles et où l’on entendait des sons stridents traverser la pièce en créant des lignes lumineuses rouges. Un sacré moment quand même. C’est sûr que pour ma gazelle ça lui parlait moins que les plumes violettes du scrapbooking de sa belle-mère.
N’ayant rien de rien pipé à tout ça, j’ai tout de même demandé le secours de l’étudiante. La seule chose que j’ai vraiment comprise, c’est que les bruits stridents étaient de la… musique. Et que l’artiste avait capté toutes les connexions infra-rouges du quartier pour en faire de la …musique.
Le message était si j’ai bien suivi l’invasion de l’informatique dans notre quotidien et à notre insu. Là je te le fais simple parce que la petite étudiante elle me l’a sorti dans un langage hermético-merdeux bien plus élégant.
J’ai rempli ma petite fiche avec mon adresse mail. Ca et ma carte de narkeo-voisine, font de moi une happy few invitée de marque du lieu.
Depuis, les expos se succèdent, les évènements se bousculent à la porte ou plutôt au rideau de fer. L’artiste est souvent japonais, canadien, australien, on est dans l’audio et le visuel, attention je n’ai pas dit audio-visuel, crétin de base. Ne confonds pas.
Les potes d’apéro de Stofa on laissé la place aux invités de vernissage, qui viennent en vélo et rient du bout des lèvres en fumant leur pétard sur le trottoir.
Tiens en exclu je te donne le pitch de la prochaine expo petit lecteur de blog de base :
Surtout si tu es migraineux ne prends pas la peine de lire.

Oscar Diaz, designer espagnol vivant à Londres propose une exposition qui montre le processus de création d’objets.
Il a acheté dix objets dans un magasin à 1£ à Londres et les a questionnés/transformés/améliorés à chaque fois dans
une seule journée. Oscar Diaz redonne une valeur alternative à ces objets simples, usuels et souvent fabriqués en Chine.


Ca c’est celui que tu as raté en avril :

Initié en 2006, le collectif Dito réunit dix jeunes designers ayant l'ambition d'imaginer une méthode de travail
collégiale et ouverte, dans laquelle le dialogue, l'échange et le partage sont privilégiés. Envisageant le design
comme un moyen et non une fin, sa vocation est de se créer un langage commun et de dessiner un ensemble
d'objets porteurs de cette réflexion. L'exposition « Dito From Scratch » témoigne de cette expérience.


Et last but not least, celui du 6 mai dernier et là, j’ai trop la haine d’avoir bossé tard parce que ça donnait trop trop envie… Je ne me remettrai jamais de l’avoir râté !!!


La bande passante est un regroupement d'individus souhaitant soutenir et engager des démarches artistiques et/ou pédagogiques utilisant les outils visuels et sonores comme supports et moyens d'expression et d'émancipation.
Au delà d'initier ou de proposer des pratiques culturelles, nous souhaitons partager notre sensibilité et notre regard sur le monde, nos processus créatifs, vivre et faire vivre des expériences humaines. Nous défendons vivement l'accessibilité à la culture et la liberté d'expression. Dans un contexte de disparités culturelles et sociales, nous tentons de développer ces échanges en milieux spécifiques, vers des publics dits « empêchés », ou sur des territoires isolés.

La bande passante s'inscrit dans une démarche d'éducation populaire, qui est de permettre aussi largement que possible l’épanouissement d’individus citoyens, c'est à dire sensibles et avertis, aptes à comprendre la société et à s'y investir.(...) Nous entreprenons des actions pédagogiques autour des différentes pratiques artistiques audiovisuelles, sous forme d'ateliers, de formations, de rencontres ou toute forme d'accompagnement.(...)

La création est au coeur de nos actions. Nous encourageons la création originale et indépendante, dégagée de toute stratégie économique et sous toutes formes d'expérimentation. Ainsi, nous soutenons l'action militante des Cinémas d'Art et d'Essai, favorisant les rencontres entre les films, leurs auteurs et le public, et souhaitons y inscrire les œuvres ou objets artistiques que nous portons."


Parfois je pense à Stofa et ses apéros, et je finis par les trouver poétiques et si simples, si « la vie quoi », mais bon mes nouveaux voisins me font tout de même bien sourire et il vaut mieux ça qu’une permanence du parti du borgne ou du nain finalement. ..

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